Musique non autorisée

On est samedi, le soleil brille.

Je pars arpenter les rues piétonnes de la ville à la recherche d’un bout de trottoir où jouer quelques notes et déposer mon chapeau. Je trouve une devanture de magasin en rénovation et m’y installe.

Quelques personnes se laissent stopper par la mélodie et s’arrêtent pour écouter.

Bien vite, j’aperçois dans mon champ de vision deux grosses paires de « Rangers » noires qui s’approchent et les charmants uniformes qui les surplombent.

Je fais mine de ne pas les voir et d’être trop concentré sur ma musique pour les calculer. Ils se font de plus en plus pressants et sont maintenant à quelques centimètres de mon instrument. Les passants observent la situation avec attention, guettent ma réaction. Le temps semble suspendu.

-Monsieur…

La musique continue.

-MONSIEUR !

Je m’arrête et lève les yeux vers eux.

Pas de bol, ces deux têtes, je les connais…et c’est réciproque !

Pour la forme, l’un d’eux me demande :

-Est ce qu’on pourrait voir votre autorisation pour faire de la musique dans la rue ?

Pas même une semaine depuis notre dernière altercation pour les mêmes raisons. Je leur avais dit ce que j’en pensais de leurs autorisations et ça avait fini en contrôle d’identité avec une amende de 90€ à la clé, pour clôturer la rencontre en beauté. Ils m’avaient alors prévenu :

« Ca t’apprendras a faire le malin. Et si on te revoie, on t’embarque, toi et ton instrument. »

Me voilà donc, de nouveau, face à ces deux uniformes au regard bien énervés de me voir si vite revenu.

Je ne fais pas vraiment le malin. J’ai bien en tête qu’être embarqué signifie que mon instrument en ressorte possiblement avec quelques fausses notes… Contrairement aux autres fois ou j’essayais -sans succès- de faire un peu scandale pour faire réagir les passants, cette fois, je range mes affaires sans m’adresser à personne.

Mais à ma grande surprise, quelques personnes réagissent et refusent de continuer leur chemin. Trois d’entre elles commencent à faire chier les flics tandis qu’un autre prend mon chapeau et s’en va voir les badauds. Il leur explique la situation et leur demande un peu de soutien. Cette solidarité a le don d’énerver les deux agents et je sens de plus en plus que ça va mal finir pour moi…

Un des passants ayant capté la situation me souffle à l’oreille : « On va rester avec toi le temps qu’il faudra pour qu’ils partent »

Les flics, pour ne pas perdre totalement la face, me gratifient cette fois d’une amende majorée soi-disant de 150€…que je n’ai, à ce jour, jamais reçue !

Et puis, elle aura beau arriver…